Un homme devant la justice pour 200 000 euros en faux billets à … – Monaco Tribune

Les billets fac-similés ont été retrouvés dans une pochette, dans le coffre d’une voiture…
L’histoire est digne d’un film policier. Le mardi 3 janvier dernier, Arthur* comparaissait devant le tribunal de Monaco. Assisté d’une interprète, ce vendeur dans l’industrie automobile, de nationalité néerlandaise mais vivant à Milan, est jugé pour association de malfaiteurs et escroquerie.
Les faits remontent au 1er janvier 2021. Alors qu’il circule sur l’avenue de Grande-Bretagne, à Monaco, un policier remarque la présence d’une Mercedes garée à hauteur de la boutique Louboutin. A l’intérieur du véhicule, le conducteur et un passager à l’arrière : Arthur.
Le policier effectue un contrôle et découvre tout d’abord que les deux hommes sont « défavorablement connus des services de police. » Mais la surprise ne s’arrête pas là. Lorsqu’il demande l’ouverture du coffre de la voiture, le policier trouve une petite pochette qui contient dix bottes de cent billets de 200 euros, soit 200 000 euros au total. Seulement voilà, si les billets en haut des bottes sont des vrais, tous les autres sont faux, ou plus précisément fac-similés.
Même si les deux hommes contestent être les propriétaires de la fameuse pochette, tous deux sont placés en garde à vue pour détention de faux billets. Mais en visionnant des images de vidéosurveillance, la Sûreté Publique constate que la pochette semble appartenir en réalité à une troisième personne. Un homme, dont Arthur ne connaît que le prénom : Giuseppe.*
« Lorsque le véhicule arrive sur les caméras, on voit bien trois personnes, récapitule le Président du Tribunal. On les voit descendre et aller au Café de Paris. Le troisième homme a bien la sacoche sur lui et il va seul à l’Hermitage, au Metropole… »
Des faits qui se sont donc produits avant l’interpellation : le chauffeur du véhicule et Arthur sont repartis ensemble, tandis que Giuseppe a pris un taxi à hauteur du Fairmont et, selon les dires de son chauffeur, serait parti à Cannes.
Une histoire bien complexe, donc, car il s’agit désormais pour la justice de déterminer le rôle que chacun a joué dans cette affaire. « Le chauffeur de votre VTC a été mis hors de cause, rappelle le Président. Il a été contacté pour amener deux personnes à Monaco : vous et ce troisième homme. »
L’accusé acquiesce. Il précise qu’il comptait venir d’Italie avec sa propre voiture, mais qu’à la demande de Giuseppe, il l’aurait garée à Vintimille et aurait ensuite pris ce fameux taxi. « Il m’a dit : « on ne va pas aller à Monaco avec ta vieille voiture, on va prendre une Mercedes » », explique-t-il.
« Comment avez-vous connu cet homme ? », questionne le Président. « On s’est rencontrés trois ou quatre jours avant. On jouait aux cartes dans un camp de Roms en Italie. Il m’a proposé d’aller à Monaco, j’ai accepté. Je voulais voir Monaco, aller au Casino, au restaurant… »
Marié et père de cinq enfants, le prévenu insiste : c’est Giuseppe qui a commandé le taxi chargé de le récupérer à Vintimille. Quant à la sacoche pleine de faux billets, « elle n’était pas à moi, affirme-t-il. Je l’ai juste mise dans le coffre de la voiture à sa demande. Il ne m’a pas dit ce qu’il y avait dedans, et je ne le lui ai pas demandé. »
Arthur aurait-il été le bras droit malgré lui dans cette affaire ? Difficile à dire. Car lorsque le Président confronte le prévenu à ses antécédents, la liste est longue. Malgré un casier judiciaire vierge en France et à Monaco, Arthur est en effet connu pour des faits de vol et d’escroquerie en Italie et de cambriolage en Allemagne (pour lequel il a effectué un an et trois mois de prison).
« De 1985 à 2015, vous êtes connu pour 52 délits financiers, neuf affaires de violence, trois infractions liées au port ou à la détention d’armes, 14 délits non répertoriés, cinq infractions aux Pays-Bas… », énumère le Président, qui précise aussi qu’Arthur a eu plusieurs « alias ».
Plus curieux encore, les autorités monégasques ont découvert dans le portable du prévenu des photos… de billets de banque. Des billets qui ressemblent d’ailleurs, selon le Président, aux liasses retrouvées dans la sacoche. « Coïncidence troublante… Pourquoi aviez-vous ces photos ? », interroge le Tribunal. « Mes amis m’envoient ça, pour s’amuser. »
Plutôt sceptique face à cette déclaration, le Président soulève une autre interrogation. « Lorsque vous étiez en maison d’arrêt à Monaco, vous avez eu une conversation téléphonique avec votre épouse. Nous avons eu l’enregistrement : elle vous dit que la situation dans laquelle vous vous trouvez est de votre faute parce que vous avez voulu prendre votre part. Qu’a-t-elle voulu dire ? »
Arthur ne semble pas comprendre. « Elle ne m’a pas dit ça », rétorque-t-il.« C’est pourtant ce que notre interprète a entendu », répond le Président. « Mais quelle langue rom parlait votre interprète ? C’est différent d’un pays à l’autre. »
Le juge perd patience. « S’il n’avait pas compris, il nous l’aurait dit et il n’aurait pas traduit », s’agace-t-il.
Autant d’éléments qui font douter le Procureur de la totale innocence du prévenu. « Il avait conscience de ce qu’il faisait, affirme-t-elle. Nous avons rappelé les similitudes entre cette affaire et d’autres affaires. Mais le coup de grâce, c’est bien l’appel de son épouse. Les faits sont parfaitement caractérisés : Monsieur fait ses choix, il tente sa chance. Aujourd’hui, il a perdu. » Sont requis à l’encontre d’Arthur huit mois de prison ferme.
Mais pour Me Baudoux, son avocat, « ce dossier dégage un fumet de rip deal. Monaco est une Principauté très surveillée et on connaît toutes les allées et venues de mon client. Or, il n’existe aucune tentative d’acquérir quoi que ce soit dans un magasin. Rien n’affirme donc la tentative d’escroquerie. (…) Rien ne permet non plus d’affirmer que mon client connaissait Giuseppe, cet élégant bipède que l’on voit constamment en possession de la sacoche. »
« Lorsque l’on prépare un rip deal, poursuit l’avocat, on choisit son véhicule et une certaine tenue vestimentaire. Je suis surpris de voir que Giuseppe était bien habillé, alors que mon client portait une tenue qui n’est pas habituelle pour un rip deal. Ces éléments m’interrogent et m’interpellent. (…) Dernière chose : le coup de téléphone de son épouse. Elle lui parle de prendre sa part, oui. Mais sa part de quoi ? Cela pourrait être de jouissance , de plaisir, de satisfaction ! »
Au terme de sa plaidoirie, Me Baudoux demande la relaxe pure et simple de son client. Le délibéré sera rendu le 17 janvier prochain.
*Prénoms modifiés

ces 30 derniers jours

source

A propos de l'auteur

Backlink pro

Ajouter un commentaire