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PARIS: La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) rend mercredi un arrêt très attendu sur le rapatriement de familles de djihadistes français, deux mois après que Paris, longtemps très réticent à faire revenir ses ressortissants partis faire le jihad en Syrie, a ramené 35 mineurs et 16 mères.
La Grande chambre, formation suprême de la juridiction européenne, rendra sa décision à 11H00 (09H00 GMT), un an après l’audience qui s’était tenue fin septembre 2021.
La Cour avait été saisie par deux couples de Français qui avaient demandé en vain aux autorités françaises le rapatriement de leurs filles, deux jeunes femmes compagnes de djihadistes, et de leurs trois enfants.
Les quatre requérants soutiennent que ce refus viole plusieurs articles de la Convention européenne des droits de l’homme, texte que la CEDH est chargée de faire respecter, en exposant notamment leurs filles et petits-enfants à des “traitements inhumains et dégradants”.
Les deux femmes avaient quitté la France en 2014 et 2015 pour rejoindre la Syrie où elles ont donné naissance à deux enfants pour l’une, à un pour l’autre. Désormais âgées de 31 et 33 ans, elles sont retenues avec eux depuis début 2019 dans les camps d’Al-Hol et de Roj, dans le nord-est de la Syrie.
«Dernier rempart»
Interrogé par l’AFP, le père de l’une d’elles, qui souhaite garder l’anonymat, s’est dit “raisonnablement optimiste” quant à une condamnation de la France. “On attend la reconnaissance du droit. Qu’elles soient rapatriées et jugées (en France) pour ce qu’elles ont fait”.
Si la CEDH ne condamne pas la France, “ça voudra dire (que Paris) a le droit de maintenir des enfants en zone de guerre (…) parce que leurs parents ont fait les mauvais choix”, a estimé Me Marie Dosé, l’une des avocates des familles. Elle appelle à ne pas faire “sauter le dernier rempart qu’est l’enfant et l’innocence de l’enfant”.
La décision du bras judiciaire du Conseil de l’Europe sera scrutée bien au-delà de la France, car elle concerne également les centaines de ressortissants européens actuellement détenus en Syrie. Sept États membres du Conseil (Norvège, Danemark, Royaume-Uni, Pays-Bas, Belgique, Espagne et Suède) sont ainsi intervenus dans la procédure.
Cet arrêt “dépasse le cadre franco-français” et “va marquer la jurisprudence de la Cour”, a-t-on estimé auprès de la Défenseure des droits, l’ombudsman français chargé de la défense des droits, notamment ceux des enfants.
Autorité administrative indépendante, la Défenseure est intervenue dans la procédure devant la CEDH et avait déjà interpellé à plusieurs reprises depuis 2019 le gouvernement français sur ce sujet, estimant déjà qu’il ne prenait pas en compte l’intérêt supérieur de l’enfant.
En février, Paris a même été épinglé par le Comité des droits de l’enfant de l’ONU, qui a estimé que la France avait “violé les droits des enfants français détenus en Syrie en omettant de les rapatrier”.
«Juridiction»
“La question centrale” de ce dossier, c’est celle de la “juridiction”, explique l’institution : la France exerce-t-elle de façon extraterritoriale sa juridiction sur ces mères et leurs enfants en Syrie? C’est en tout cas la première fois que la CEDH se penchera sur cette question.
C’est en effet de cette reconnaissance de juridiction que découle l’obligation de l’Etat de rapatrier ces enfants et leurs mères, souligne la Défenseure.
Ailleurs en Europe, des pays comme l’Allemagne ou la Belgique ont d’ores et déjà récupéré la plus grande partie de leurs djihadistes. De son côté, au grand dam des familles et des ONG, Paris a longtemps privilégié le “cas par cas”, doctrine défendue devant la CEDH par son représentant.
Mais début juillet, la France a fait revenir 35 mineurs et 16 mères, premier rapatriement massif depuis la chute en 2019 du “califat” du groupe État islamique (EI). Jusqu’alors, seuls quelques enfants avaient été ramenés.
Les mères, toutes visées par un mandat de recherche ou d’arrêt français, ont été mises en examen et écrouées, les mineurs confiés à l’Aide sociale à l’enfance.
Selon le coordinateur du renseignement français et de la lutte contre le terrorisme, Laurent Nunez, il restait après cette opération une centaine de femmes et près de 250 enfants français dans des camps en Syrie. “Chaque fois que nous le pourrons, nous procéderons à des opérations de rapatriement”, a-t-il déclaré mi-juillet à l’AFP.
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PARIS: Cent-cinquante cadres du PS ont signé dans le JDD une tribune baptisée “Refondations”, prélude à une “troisième voie”, entre la ligne pro-Nupes prônée par le premier secrétaire Olivier Faure et celle de son opposante Hélène Geoffroy, pour le prochain congrès du PS.
Les porte-parole de cette tribune sont le maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol, la conseillère de Paris Lamia El Aaraje, -proche d’Anne Hidalgo-, et la vice-présidente de la région Occitanie, Claire Fita, -proche de Carole Delga-.
Ni la maire de Paris ni la présidente de la région Occitanie, toutes deux réfractaires à la Nupes, n’ont signé cette tribune, mais de nombreux proches des deux femmes s’y trouvent, à l’instar des sénateurs David Assouline ou Patrick Kanner, à la manoeuvre pour cette “troisième voie”.
La date du prochain Congrès du PS sera connu à l’issue d’un conseil national du parti mardi soir.
“L’enjeu du congrès du Parti socialiste ne peut être à nouveau réduit à un affrontement d’écuries pour le pouvoir, ni à un choix de tactiques électorales les yeux rivés sur la prochaine élection présidentielle”, écrivent les signataires, qui “souhaitent rassembler les socialistes sur l’essentiel pour pouvoir espérer à nouveau rassembler la gauche durablement”.
Ils soulignent que “l’accord électoral Nupes a été le produit de l’état +comatique+ de la gauche sociale et écologique, une réponse électorale unitaire attendue par le peuple de gauche face à sa dispersion, une réponse conjoncturelle visant à préserver sa présence à l’Assemblée Nationale et y agir ensemble”.
Mais “pour regagner et créer une dynamique positive, d’espérance et de conquêtes (…) nous devons refonder (la gauche) avec audace et sincérité, et changer son centre de gravité actuel qui la conduit à l’impasse”, ajoutent-ils, en proposant “à toutes les forces politiques et engagées de la société civile et des mouvements sociaux, l’organisation d’Etats Généraux de la transformation sociale et écologique”.
“Les Français nous disent, on est orphelins d’un parti crédible à gauche, on ne vous entend pas aujourd’hui”, a expliqué à l’AFP Nicolas-Mayer Rossignol, défendant une “gauche pro européenne, laïque et universaliste”, et s’appuyant sur “la ruralité et les expériences locales” des territoires dirigés par la gauche.
Il assure que les signataires ne sont “pas dans l’aigreur, ni dans le pugilat” contre le Premier secrétaire du PS Olivier Faure, partisan de la Nupes.
Samedi matin, Hélène Geoffroy, la maire socialiste de Vaulx-en-Velin et présidente du courant minoritaire au sein du PS, a également lancé dans un texte baptisé “Refonder, rassembler, gouverner”, les bases de son projet pour prendre la tête du parti au futur Congrès du parti.
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PARIS: Au lendemain d’un article-choc de Libération, la direction d’EELV a réaffirmé samedi sa confiance dans la cellule interne du parti chargée des violences faites aux femmes, après les accusations de violences psychologiques visant son ex-secrétaire national Julien Bayou.
Europe-Ecologie Les Verts, qui réunit ce week-end comme prévu son conseil fédéral -le parlement du parti-, avait rassemblé dans la matinée son bureau exécutif et la cellule interne, après un article de Libération révélant vendredi que Julien Bayou, qui a démissionné après des accusations de violences psychologiques sur une ex-compagne, était sous la surveillance de militantes féministes du parti.
“Les informations parues dans Libé confirment la nécessité de réfléchir à la meilleure façon de traiter ce cas particulier”, a expliqué un cadre d’EELV à l’AFP. Selon une autre source, il était “normal que les informations dans cet article soient prises en compte et traitées politiquement”.
A l’issue de cette réunion, le bureau exécutif a renouvelé sa “confiance” dans la cellule interne, dont le travail a été critiqué par l’avocate de Julien Bayou, et par plusieurs responsables politique extérieurs, dénonçant une “justice privée”.
Le secrétaire national adjoint Jérémie Crépel, qui remplace temporairement, avec Léa Balage, Julien Bayou, a fait part de “notre fierté de recueillir la parole des victimes et de traiter avec sérieux les violences sexistes et sexuelles alors que d’autres choisissent de les ignorer”.
Il a souligné que “la possible nécessité d’externaliser toutes ou une partie des enquêtes (était) sur la table”, mais a salué l’abnégation” des membres de cette cellule, “instance disciplinaire de notre mouvement chargée de proposer des sanctions internes”.
Il a aussi confirmé qu’un audit “par un organisme externe indépendant”, prévu bien avant l’affaire, “sera fait”.
L’ordre du jour ordinaire du conseil fédéral est de décider du calendrier du prochain congrès. Celui-ci devrait avoir lieu en décembre, car un référendum interne, visant à le décaler, n’a pas obtenu le nombre de voix suffisant pour être validé.
«Ce qu’elle peut»
Le parti connaît des secousses internes depuis la démission lundi de Julien Bayou, pour pouvoir selon lui se défendre des accusations auxquelles il fait face et qu’il dément, sans qu’il n’y ait de plainte ni d’enquête judiciaire.
L’article de Libération a accentué le malaise, en révélant que depuis trois ans, Julien Bayou vivait sous la pression d’un collectif féministe informel qui lui reprochait sa conduite et enquêtait sur ses relations avec les femmes.
Dans un communiqué, EELV a précisé que “toutes les personnes ayant un lien avec Julien Bayou se sont déportées du dossier” instruit par la cellule interne. Libération a indiqué que l’une des membres de cette cellule fait partie du groupe informel ayant ciblé la vie privée de Julien Bayou.
La cellule “n’a pas estimé qu’il y avait lieu de suspendre de manière conservatoire Julien Bayou et elle poursuit son travail et ces auditions”, ajoute le texte.
“La cellule fait ce qu’elle peut. On est sur des sujets à propos desquels il n’y a pas de nomenclatures ni de procédures établies”, mais “on ne peut pas réduire une stratégie de lutte victorieuse à des initiatives individuelles, parfois approximatives”, expliquait dans la matinée un cadre du parti à l’AFP.
La cellule s’était autosaisie d’une enquête sur Julien Bayou en juillet après un courriel de son ex-compagne, dont il s’est séparé en novembre 2021.
L’affaire a pris un nouveau tour la semaine dernière, lorsque la députée Sandrine Rousseau l’a accusé de “comportements de nature à briser la santé morale des femmes” sur un plateau TV, racontant avoir “longuement” reçu l’ex-compagne de Julien Bayou.
Le bureau du groupe écologiste à l’Assemblée nationale avait alors suspendu Julien Bayou de ses fonctions de coprésident du groupe.
Cette décision a été prise “pour donner de la sérénité à la cellule d’écoute mais ça apparaît comme une sanction (…) et cette sanction-là, elle n’est pas normale”, a critiqué vendredi l’ex-candidat à la présidentielle 2022, le député européen Yannick Jadot, qui avait pourtant demandé lui-même une mise en retrait de la tête du parti.
Dans un tweet, l’ex-candidate écologiste à la présidentielle, Eva Joly, a réagi à l’article de Libération: “La fin ne justifie pas les moyens. Ces agissements hors de tout cadre desservent la cause qu’ils sont censés faire avancer et sont dangereux pour celles-là mêmes qu’on prétend protéger”.
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ROUBAIX : “Je suis venue les soutenir et leur dire au-revoir”: Djamila Bal, une cliente fidèle, défie la cohue dans le magasin Camaieu à Roubaix, siège de l’enseigne en liquidation, pour étreindre les vendeuses, qui bradent les derniers vêtements avant de fermer définitivement boutique samedi soir.
“Shopping Camaieu 100% pour les salariés,” annonce la page Facebook du centre commercial roubaisien. Selon les syndicats, le produit des ventes de ces trois derniers jours doit être utilisé pour améliorer les possibilités de formation et reconversion dans le cadre du plan social.
C’est la foule des jours de solde, à Roubaix comme dans de nombreux magasins de France: le prix sont affichés à moins 50%, voire moins 70%, et les derniers stocks disparaissent à vue d’oeil.
“Il n’y a plus rien, c’est fini, fini” explique à une cliente Emilie Vidart, vendeuse depuis onze ans chez Camaieu, réarrangeant fébrilement des TShirt “Zen attitude” et “no worries” sur des portants.
“C’est la journée 100% émotion”, lance-t-elle. Elle se demande “si on va retrouver ça, une ambiance familiale”, tandis qu’une cliente venue acheter un manteau “par solidarité” écrase une larme.
«Plonger dans l’inconnu»
Pour l’enseigne nordiste de prêt-à-porter, employant quelque 2.600 salariés dans un demi-millier de boutiques, le couperet est tombé jeudi, après 40 ans d’existence.
L’actionnaire, Hermione People and Brands (HPB), filiale de La Financière immobilière bordelaise (FIB) de l’homme d’affaires Michel Ohayon, a échoué à convaincre le tribunal de commerce de la fiabilité de son plan de redressement, deux mois après le placement de l’enseigne en redressement judiciaire.
Le gouvernement a pour sa part mis en cause un plan d’affaires non crédible, et une demande d’avance de fonds publics “déséquilibrée” par rapport aux apports des actionnaires.
“J’ai connu un licenciement aussi il y a trois ans, je sais ce que ça fait de plonger dans l’inconnu”, souligne dans la boutique roubaisienne Djamila Bal, cliente quadragénaire. “Je peux vous faire un câlin?”, lance-t-elle à une vendeuse.
“Même sur Tik Tok, j’ai vu passer des vidéos sur nous, ça nous touche”, s’émeut Marie Lemouchi, une vendeuse de 29 ans. Elle s’inquiète de quitter une enseigne “à l’ambiance familiale”, mais espère réussir à rebondir.
Dans certains magasins, des clients ont même apporté chocolats et boissons gazeuses, rapporte Nordine Misraoui, délégué CFDT. “Ce soir, c’est comme une fin de vie, on va débrancher la machine”, indique-t-il à l’AFP, déplorant la “casse sociale évitable”, alors que les activités de l’entreprise doivent s’arrêter à 23H.
«Affaires» et «soutien»
A Bordeaux, où la file aux caisses est également longue, Ludivine Cochin, venue “faire des affaires et soutenir les salariés”, a été mise au courant des déboires de l’entreprise par “une cousine qui travaille chez Camaïeu en Bourgogne”. “J’aimais bien cette marque, je vais la regretter”.
A Paris, dans la galerie marchande de la Gare de Saint-Lazare, Nini, une cliente de 66 ans, trouve cela “désolant”: “je croyais jusqu’à la dernière minute qu’ils allaient avoir un repreneur comme habituellement certains magasins”.
“On s’en doutait un petit peu, ces dernières années c’est un petit peu difficile, on a été en redressement il y a deux ans, on a été racheté. On va dire que la société était un petit peu bancale”, philosophe Nadia, 42 ans, gérante adjointe chez Camaieu depuis cinq ans.
“On n’a jamais eu autant d’affluence que depuis trois jours, même en période de soldes”, relève-t-elle.
Dans le magasin, un chevalet accueille les clients avec un message de l’équipe : “Pardon si nous peinons à vous accueillir comme vous le méritez et comme nous le voudrions. Nous sommes anéantis et tellement fatigués. Nous sommes en deuil”.
Autour ont fleuri des post-it de soutien: “triste nouvelle bon courage à vous tous !”, “Je souhaite à tout le personnel Camaïeu de reprendre un autre chemin professionnel. Vous le méritez”.