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Depuis le 10 avril, des comptes Facebook relaient une affiche critiquant le bilan d’Emmanuel Macron. Selon ces publications, l’actuel président de la République serait responsable de plusieurs augmentations du coût de la vie qui auraient eu lieu ces deux dernières années. Mais si certains chiffres sont vérifiables, la plupart de ces affirmations ne correspondent pas à la réalité.
La vérification en bref
- Depuis l’annonce des résultats du premier tour de l’élection présidentielle, une affiche critiquant le bilan d’Emmanuel Macron est partagée par de nombreux comptes Facebook.
- D’après ces publications, les deux dernières années de mandat de l’actuel président auraient entraîné plusieurs augmentations du coût de la vie.
- Si certains chiffres avancés sont vérifiables, la plupart de ces affirmations sont fausses.
Le détail de la vérification
“Pour ceux qui pensent voter Macron dimanche…”. Depuis le 10 avril, des comptes Facebook partagent une affiche critiquant le bilan d’Emmanuel Macron. Ces comptes affirment que, depuis deux ans, les décisions prises par l’actuel président de la République ont entraîné plusieurs augmentations telles que des hausses de 13 % des frais bancaires, de 10 % du prix des timbres, ou même de 130 % pour les procès verbaux de stationnement. Ces publications comparent ces chiffres à l’évolution du Smic, qui aurait seulement augmenté de 1,2 % sur la même période.
Cette augmentation de 1,2 % date en réalité de janvier 2018. Cette année-là, une publication similaire circulait déjà sur les réseaux sociaux. Elle comparait cette augmentation du Smic à plusieurs augmentations du coût de la vie qu’elle attribuait à la première année de mandat d’Emmanuel Macron. Certains chiffres diffusés par cette publication étaient faux et avaient alors été vérifiés par le quotidien 20 Minutes.
Or, à l’image de cette augmentation, plusieurs chiffres utilisés dans cette publication de 2018 sont repris aujourd’hui par l’affiche critiquant les deux dernières années de mandat d’Emmanuel Macron. C’est, par exemple, le cas de la hausse du forfait hospitalier, de la hausse des frais bancaires, ou encore de l’augmentation spectaculaire des procès verbaux de stationnement.
Mais puisque les comptes qui partagent cette nouvelle affiche au mois d’avril 2022 affirment que ces augmentations ont bien eu lieu sur les deux dernières années, nous avons vérifié ces chiffres sur la période 2020 – 2022 à l’aide de différents indicateurs et jeux de données correspondant.
Une augmentation surestimée des frais bancaires
Le premier chiffre à vérifier est celui de +13 % pour les frais bancaires, à savoir l’ensemble des coûts facturés par les banques et les établissements de crédit pour la réalisation de leurs services (ouverture de compte, frais d’incidents…). Ces frais sont définis par les établissements bancaires eux-mêmes, mais certains, comme les frais pour dépassement de découvert, sont plafonnés par l’État.
Puisque ces frais varient fortement en fonction des banques et des profils de consommateurs, ils sont mesurés selon plusieurs indicateurs par l’Observatoire des tarifs bancaires (OTB) et l’association de consommateurs CLCV. Cette association produit notamment chaque année une étude comparant l’évolution de ces tarifs pour des profils de “petit consommateur”, “consommateur moyen”, et “gros consommateur”, définis en fonction du nombre de services bancaires auxquels ils ont recours. Or, entre 2020 et 2022, ces études n’ont pas relevé de hausse majeure des frais bancaires.
Entre 2020 et 2021, d’après la CLCV, les frais bancaires étaient relativement stables : ils ont augmenté de 1,06 % pour les “petits consommateurs”, mais sont restés stables pour les deux autres profils.
Ce n’est qu’en 2022 que les frais bancaires connaissent une légère hausse. Dans son communiqué publié en janvier, la CLCV explique : “S’il est quasiment stable sur notre profil ‘gros consommateur’ de services (0.27 %), le coût moyen de notre panier en métropole est en revanche en augmentation de 2,58 % pour notre ‘petit consommateur’ de services et de 2,7 % pour notre ‘consommateur moyen’.” Sur les années 2020 à 2022, les frais bancaires n’ont donc pas connu une hausse de 13 %.
Une hausse avérée du prix des carburants
Le deuxième chiffre concerne la hausse des prix des carburants qui, d’après cette publication, serait de 12 % entre 2020 et 2022. Pour vérifier cette affirmation, nous avons utilisé les données publiées par le ministère de la Transition écologique.
Ces données comportent l’évolution du prix moyen de plusieurs carburants automobiles tels que le gazole ou le sans plomb 95. A partir de ces chiffres, nous avons calculé le prix moyen toutes taxes comprises d’un litre de carburant. Or, entre le 1er janvier 2020 et le 8 avril 2022 (dernière date d’actualisation de ces données), ce prix moyen a augmenté de 12,5 %.
Ce chiffre correspond donc bien à l’affirmation diffusée par cette affiche publiée sur Facebook. Il faut cependant noter que cette évolution n’est pas la même pour tous les types de carburants et que, comme le démontre le graphique ci-dessus, l’augmentation des prix des carburants est plus importante depuis le mois de février 2022. Cela correspond aux conséquences économiques du début de l’invasion russe en Ukraine. En réaction, le gouvernement a annoncé une remise de 15 centimes d’euros par litre de carburant, effective pendant quatre mois à partir du 1er avril 2022.
Un chiffre incohérent pour les procès verbaux de stationnement
L’affiche critiquant le bilan d’Emmanuel Macron comprend aussi un chiffre impressionnant : depuis 2020, le prix des procès verbaux (PV) de stationnement aurait augmenté de 130 %. Depuis le 1er janvier 2018, et l’entrée en vigueur d’une loi votée en 2014, ce tarif des PV de stationnement (devenu forfait de post-stationnement, ou FPS) n’est plus le même sur l’ensemble du territoire français. Il est aujourd’hui fixé par les collectivités locales.
Son prix ne dépend donc pas des compétences du président de la République. D’une ville à l’autre, le FPS connaît des variations de prix. Il est par exemple passé, en août 2021, de 50 à 75 euros dans certaines zones de Paris. Tandis qu’à Calais, ce forfait a été abaissé de 17 à 11 euros depuis quatre ans. Du fait de ces disparités très importantes d’une ville à l’autre, cette affirmation selon laquelle le prix des PV de stationnement aurait augmenté de 130 % entre 2020 et 2022 est donc incohérente.
Les assurances n’ont pas augmenté de 4 % en deux ans
D’après cette publication, le coût des assurances aurait augmenté de 4 % en deux ans. Pour estimer ce coût, qui varie fortement en fonction des types d’assurances (auto, habitation…), on peut utiliser l’Indice des prix à la consommation (IPC) édité par l’Insee. Cet indice mesure l’évolution du niveau moyen des prix de certains biens ou services (ici les assurances) consommés par les ménages. Ce niveau moyen est ensuite pondéré par la part de ces biens et services dans la consommation moyenne des ménages.
Pour les assurances, cet IPC était de 109,28 en janvier 2020. Or, en mars 2022, l’IPC est passé à 110,44. Cette augmentation de 1,16 point ne correspond donc pas au chiffre de +4 % avancé par ces publications critiquant le bilan d’Emmanuel Macron.
Une augmentation régulière du prix des timbres
Cette publication avance également que sur cette même période le prix des timbres aurait augmenté de 10 %. Ces tarifs des différents types de timbres sont fixés par la Poste et contrôlés par l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse). Ils ne dépendent pas des compétences du président de la République.
Entre janvier 2020 et janvier 2022, certains tarifs de timbres ont effectivement connu des augmentations importantes. C’est par exemple le cas pour le tarif lettre verte (+19 %), le tarif écopli (+20 %) et le tarif lettre prioritaire (+23 %).
Et sur l’ensemble des timbres, La Poste a indiqué deux augmentations successives : la première en janvier 2021 qui était alors de 4,7 %, puis la seconde en janvier 2022 qui était là encore de 4,7 %. Sur deux ans, le prix des timbres a donc augmenté en moyenne de 9,6 %, un chiffre proche de celui avancé par ces publications. D’après La Poste, ces augmentations seraient justifiées par la nécessité de maintenir le service postal malgré “l’accélération de la baisse des volumes du courrier”.
Le montant de la carte grise n’a pas autant augmenté
Le tarif de la carte grise, c’est-à-dire le certificat d’immatriculation des véhicules, dépend de plusieurs facteurs comme la puissance fiscale du véhicule. Ce tarif ne dépend pas du président de la République mais des régions qui définissent le cheval fiscal, à savoir la taxe appliquée à cette immatriculation. Le tarif de la carte grise varie donc très fortement d’une région à l’autre.
Or, entre 2021 et 2022, cette taxe sur la carte grise n’a augmenté que dans deux territoires : le Grand Est (de 42 € à 48 €) et la Martinique (de 30 € à 51 €). Cette taxe est restée stable dans toutes les autres régions. Entre 2020 et 2021, elle n’a augmenté dans aucune région.
En 2022, le montant moyen de la taxe grise était de 43,54 € le cheval fiscal contre 41,89 € en 2020. Cela représente une augmentation moyenne de 3,93 % en deux ans, loin des 15 % avancés par cette publication.
Une augmentation incalculable pour le prix des bus
D’après cette publication, le prix des bus aurait augmenté de 2 % en deux ans. Mais ce document ne précise pas s’il s’agit des transports en commun mis en place par les collectivités locales ou des bus des compagnies d’autocars. Il est donc impossible de vérifier ce chiffre.
Le tarif moyen des autoroutes a bien augmenté de 2 %
En France, les autoroutes sont gérées par des sociétés concessionnaires mais les tarifs sont réglementés par l’État. Ces tarifs connaissent des évolutions annuelles aux alentours du 1er février de chaque année.
D’après le site service-public.fr, les tarifs des péages d’autoroute ont augmenté de 2 % en moyenne en février 2022 par rapport à l’année précédente. En février 2021, cette hausse était de 0,44 % en moyenne sur l’ensemble des sociétés d’exploitation du réseau autoroutier. Ainsi, entre 2020 et 2022, les tarifs des péages d’autoroute ont augmenté en moyenne de 2,45 %, ce qui est proche du chiffre de 2 % avancé par cette publication.
Le prix du gaz connaît une très forte hausse
En France, le prix du gaz varie en fonction des fournisseurs. L’État a mis en place des tarifs réglementés réservés aux petits consommateurs et fixés par les ministres chargés de l’Énergie et de l’Économie. D’après la Commission de régulation de l’énergie (CRE), pour un ménage chauffé au gaz, ce tarif était en moyenne de 1 029 € TTC par an en janvier 2020.
Mais face à sa forte hausse tout au long de l’année 2021, ce tarif réglementé a été gelé en octobre 2021 et cela jusqu’au 30 juin 2022. Il est aujourd’hui en moyenne de 1 482 € TTC par an et par ménage chauffé au gaz. Cela représente donc en moyenne une augmentation de 44 % pour le tarif réglementé de vente du gaz, un chiffre bien supérieur au +7 % indiqué sur l’affiche.
Une ancienne réforme des frais hospitaliers
Cette augmentation du forfait hospitalier ne date pas de la période 2020 – 2022. Elle est entrée en vigueur le 1er janvier 2018. Le forfait hospitalier était alors passé de 18 à 20 € par jour mais n’a pas augmenté depuis. Cette évolution équivaut donc à une hausse de 11 % et non 15 % comme le stipule l’affiche, et surtout, elle date de quatre ans et ne concerne pas la période 2020 – 2022.
Le prix moyen du contrôle technique est stable depuis 2020
Le prix du contrôle technique n’est pas le même sur l’ensemble du territoire français et connaît des écarts importants. D’après le comparateur Simplauto, son prix moyen était de 77,60 € à la fin de l’année 2019, contre 78 € en avril 2022. En deux ans, il n’a augmenté que de 0,51 % en moyenne, et non de 23 % comme l’affirme la publication.
Le prix du fioul domestique a bien explosé
Concernant le fioul domestique, cette affiche avance une augmentation de 36 % en deux ans. Pour vérifier ce chiffre, nous avons utilisé les données publiées chaque semaine par le ministère de la Transition écologique.
Entre le 1er janvier 2020 et le 8 avril 2022 (dernière date d’actualisation de cette base de données), le prix du litre de fioul domestique a augmenté en moyenne de 50 %. Comme pour les prix des carburants, cette hausse s’est accentuée depuis le mois de février 2022 et le début de l’invasion russe en Ukraine. Mais le prix du fioul domestique est reparti à la baisse depuis le 1er avril. L’augmentation de 36 % évoquée par cette publication Facebook est donc pour l’instant sous-estimée.
L’affiche diffusée par ces publications indique que, depuis 2020, le montant de la CSG, à savoir la contribution sociale généralisée, aurait augmenté de 21 %. Ce chiffre renvoie en réalité à la hausse de la CSG qui était entrée en vigueur le 1er janvier 2018. Depuis cette date, le taux de prélèvement est passé de 7,5 % à 9,2 %, ce qui, en termes de montant, correspondait à une hausse de 22,7 %. Mais cette augmentation date de 2018 et, depuis cette date, la CSG n’a pas connu d’augmentation.
Une augmentation sous-estimée du Smic
Ce chiffre de +1,2 % correspond en réalité à la revalorisation du salaire minimum interprofessionnel de croissance qui était entrée en vigueur en janvier 2018. Pour vérifier si cette augmentation correspond également à la période 2020 – 2022, nous avons utilisé les publications de l’Insee. Or, d’après l’Institut national de la statistique et des études économiques, le Smic mensuel brut était de 1 539,42 € en 2020. En 2022, il est passé à 1 603,12 €. Cela représente donc en deux ans une hausse de 4 %, et non de seulement 1,2 % comme l’affirme cette publication.
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