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Interview
Posté le 21 octobre 2022 par Matthieu Combe dans Chimie et Biotech
Les Français rapportent de plus en plus leurs médicaments non utilisés en pharmacies. Cyclamed, l’éco-organisme responsable du tri des médicaments, nous dresse l’état des lieux de la collecte et de la valorisation des médicaments en France.
En 2021, Cyclamed a récupéré 9 833 tonnes de médicaments non utilisés (MNU) dans les 21 141 pharmacies d’officine situées en métropole et Outre-mer. Alors que la consommation de médicaments baisse en France depuis 2005, la collecte des MNU reste stable. En 2021, Cyclamed a collecté l’équivalent de 146 grammes de médicaments par habitant, soit 2,5 boîtes par habitant. Thierry Moreau Defarges, président de Cyclamed, nous explique ces résultats.
Thierry Moreau Defarges : Globalement, la consommation de médicaments en France baisse de 1 % par an depuis 2005 malgré l’augmentation et le vieillissement de la population. On est passé de 3,25 milliards de boîtes à 2,65 milliards en 2020, avec une légère remontée à 2,70 milliards en 2021. La chute de 2020 s’expliquait très clairement par la crise de la Covid qui avait eu un impact sur la consommation médicamenteuse.
Cela peut surprendre, car l’on entend parler de la croissance du marché pharmaceutique. Mais il faut bien distinguer la croissance en valeur du nombre de médicaments consommés. Si le marché croît en valeur grâce à d’importantes innovations thérapeutiques, il baisse depuis 20 ans en termes de nombre de boîtes.
La baisse s’explique par les campagnes de bon usage, d’abord développées par les administrations et par les industriels du médicament. L’idée est de souligner que le médicament n’est pas un produit comme les autres et qu’il doit être utilisé à bon escient. La plus célèbre campagne publique « les antibiotiques, c’est pas automatique » a entraîné une baisse de la consommation d’antibiotiques. Récemment, on assiste également à l’apparition des médecines douces, avec des campagnes dédiées à une médecine différente de la médecine traditionnelle.
Il y a aussi une évolution structurelle du marché. Un certain nombre de produits avec un service médical rendu insuffisant ont été déremboursés par la sécurité sociale ou retirés du marché. Je pense notamment aux vasoprotecteurs et aux vasodilatateurs, des produits qui se vendaient en millions de boîtes par mois et dont les ventes se sont effondrées. Par ailleurs, certaines formes médicamenteuses ont pratiquement disparu. Les ventes de suppositoires par exemple sont en chute libre. L’affaire du Médiator a aussi eu un effet sur la consommation de médicaments.
Enfin, un certain nombre de médicaments sont devenus des dispositifs médicaux. Les laboratoires ont transformé leur composition, mais n’ont pas apporté les mêmes preuves thérapeutiques. L’exemple type, c’est le Toplexil. Sanofi a développé un autre produit à base de plantes, le Phytoxyl, qui n’est pas un médicament mais un dispositif médical.
Dans une officine, vous trouvez d’abord les médicaments qui ont une autorisation de mise sur le marché donnée par l’ANSM, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Ce sont des produits qui ont fait l’objet d’essais de tolérance, d’essais cliniques. Il y a aussi des dispositifs médicaux, une catégorie très hétérogène de produits, en plein développement. Cela va des sirops antitussifs à la canne, en passant par les déambulateurs, les appareils à tension ou pour mesurer le diabète. Il y a aussi les cosmétiques, les compléments alimentaires qui se développent beaucoup.
La mission de Cyclamed est de récupérer les seuls médicaments à usage humain. Que faire des autres produits ? Sur les dispositifs médicaux, il n’existe pas vraiment de filière. Il y a des expérimentations ou des filières très spécifiques menées par certaines organisations humanitaires, par exemple pour récupérer les lunettes. Il y a une réflexion à avoir, par exemple sur la réutilisation des dispositifs comme les béquilles.
En 2010, nous avons mis en place une étude de gisement. La question était de savoir la quantité de médicaments chez les Français et la quantité de médicaments non utilisés. Cette étude a été faite jusqu’en 2018. Elle a montré que l’armoire à pharmacie des Français baissait de manière significative. Ce gisement qui était de 23 000 tonnes en 2010 était descendu à 17 000 tonnes en 2018.
On estime aujourd’hui que l’on récupère entre 65 et 70 % du gisement de médicaments non utilisés. En 2022, nous avons lancé une nouvelle étude avec une nouvelle méthodologie. En effet, la méthodologie précédente posait problème. Pour faire l’étude de gisement, nous pesions l’armoire à pharmacie du citoyen telle quelle : il y avait des boîtes pleines, des boîtes sans notice… Or, nous récupérons aujourd’hui les médicaments sans emballages… Et on a beaucoup de mal à interpréter exactement la part que peut représenter cette différence. Aujourd’hui, nous sommes convaincus que la quantité de médicaments qui reste au domicile des Français est très faible et que notre taux de récupération est en réalité plus proche de 80 %. Mais ce n’est pas encore démontré.
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Posté le 21 octobre 2022 par Matthieu Combe
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