Réforme du code du travail : que change la rupture conventionnelle … – Vie publique.fr

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La réforme du code du travail, engagée par le gouvernement en 2017, a instauré la rupture conventionnelle collective applicable depuis le 23 décembre 2017. Défini par un accord collectif signé avec les syndicats majoritaires, ce dispositif permet de rompre un contrat à durée indéterminée (CDI) d’un commun accord entre l’employeur et les salariés.
Par  La Rédaction

Temps de lecture  10 minutes
Créée par l’ordonnance du 22 septembre 2017, la rupture conventionnelle collective (RCC) s’inscrit dans la continuité de la procédure de rupture conventionnelle individuelle, elle-même créée par la loi du 25 juin 2008
Ce nouveau type de rupture de contrat, dont l’initiative revient à l’employeur, est a priori moins contraignant à mettre en oeuvre qu’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), notamment en ce qui concerne les mesures d’accompagnement des salariés.
La rupture conventionnelle collective autorise une entreprise à proposer, aux salariés, un départ volontaire en échange de contreparties fixées dans un accord collectif. L’accord en question est négocié par l’employeur avec les organisations syndicales majoritaires, c’est-à-dire celles représentant plus de 50% des suffrages exprimés lors des élections professionnelles. Chaque salarié concerné par l’accord dispose de la faculté d’accepter ou de refuser de rompre son contrat de travail.
Le processus qui conduit à la RCC relève toujours de l’initiative de l’employeur. Celui-ci prévient l’administration sans délai de l’ouverture d’une négociation.
D’après l’article L1237-17 du Code du travail, “ces ruptures, exclusives du licenciement ou de la démission, ne peuvent être imposées par l’une ou l’autre des parties”.
L’accord collectif contient obligatoirement les éléments suivants :
Selon un décret du 20 décembre 2017, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) sont les autorités compétentes pour valider l’accord collectif portant rupture conventionnelle collective. Elles en contrôlent chacun des éléments. Elles notifient la décision de validation à l’employeur et au comité social dans les quinze jours qui suivent la réception de l’accord collectif.
En outre, la RCC doit répondre aux dispositions relatives à la revitalisation des territoires applicables aux entreprises d’au moins 1 000 salariés. Dans ce cas, une convention doit être conclue entre le préfet et l’entreprise pour diminuer les effets économiques et sociaux sur le territoire.
Une convention-cadre nationale de revitalisation est conclue entre le ministre chargé de l’emploi et l’entreprise lorsque les suppressions d’emplois concernent au moins trois départements.
Ce dispositif, basé sur le volontariat, octroie aux salariés qui donnent leur accord un régime indemnitaire qui ne peut être inférieur aux indemnités légales dues en cas de licenciement, soit 25% du salaire mensuel par année de présence pour les 10 premières années et 33% pour les années supplémentaires. Ils bénéficient de l’assurance chômage, comme dans le cas d’un licenciement. En revanche, les salariés n’ont pas la possibilité de prétendre au contrat de sécurisation professionnelle (CSP), réservé aux licenciés économiques.
Pour l’employeur, la RCC permet de s’affranchir des procédures en vigueur dans le cas de licenciements économiques. Surtout, elle ouvre la possibilité de négocier des accords collectifs de départs alors que l’entreprise est bénéficiaire. Aucune justification sur la santé économique de l’entreprise n’est demandée par l’administration. L’entreprise peut engager immédiatement de nouveaux salariés, y compris sous d’autres statuts.
Pour le gouvernement, la RCC doit permettre aux entreprises de mieux anticiper leurs projets de réorganisation et leurs efforts d’adaptation aux changements conjoncturels ou structurels, dans le cadre d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences désormais très élargie. C’est un outil destiné à favoriser une meilleure anticipation des restructurations et à permettre aux entreprises de mieux gérer les situations difficiles en amont d’un plan de sauvegarde de l’emploi.
Chez les syndicats de salariés, en revanche, le dispositif suscite des inquiétudes.
Le fait de supprimer l’exigence de difficultés économiques comme pré-requis au licenciement pourrait ouvrir la voie à la soustraction des employeurs aux obligations que posent les plans de sauvegarde de l’emploi. Ainsi, l’entreprise aurait toute liberté pour “dégraisser”.
La CGT a ainsi estimé, dans un communiqué du 14 janvier 2018, que le nouveau dispositif “aide à licencier” et ne peut donc pas lutter contre le chômage.
Pour le syndicat Solidaires : “la rupture conventionnelle collective est en réalité un plan de licenciement déguisé, sans aucune garantie”. La RCC pourrait être utilisée pour “cacher des licenciements et permettre la destruction de milliers d’emplois”.
Pour répondre à cette critique, le ministère du travail rappelle que la RCC est exclusive du licenciement, elle ne peut être imposée par l’employeur.
Les cas des entreprises Pimkie et PSA 
Ces deux entreprises ont été les premières à opter pour la rupture conventionnelle collective dès janvier 2018.
La RCC présentée par l’enseigne de prêt-à-porter Pimkie prévoyait le départ de 208 salariés. Celle-ci a été rejetée par les syndicats le 8 janvier 2018. L’entreprise et deux syndicats ont alors signé un accord de méthode en vue de négocier un plan de départs volontaires. La CGT et la CFDT ont refusé de signer cet accord, militant pour un plan de sauvegarde de l’emploi qui permettrait la désignation d’un expert pour évaluer les motifs économiques des suppressions d’emplois.
L’accord de rupture conventionnelle collective présenté par le constructeur automobile PSA a été officiellement signé par les organisations syndicales représentatives le 19 janvier 2018. Il concernait 1 300 départs volontaires, auxquels devaient s’ajouter 900 départs en congés seniors. PSA avait par ailleurs annoncé sa volonté de recruter 1 300 CDI et 2 000 jeunes en apprentissage en 2018.
La Société Générale, le Figaro, les Inrocks, IBM, Téléperformance… Plusieurs entreprises se sont tournées vers ce dispositif de RCC. Au 1er septembre 2018, 69 procédures de ruptures conventionnelles collectives ont été enregistrées et 43 ont été validées d’après une évaluation du ministère du travail.
La RCC ne concerne pas seulement les salariés du secteur privé. En avril 2019, la Caisse des dépôts a proposé aux syndicats un projet d’accord de rupture conventionnelle collective qui pourrait concerner une centaine de salariés et fonctionnaires de l’établissement public. L’accord sur le “renouvellement des compétences” a été signé le 24 septembre 2019 par l’UNSA, la CFDT et la CGC.
Les seniors
Pour le syndicat CFDT, la rupture conventionnelle collective ne favorise pas la création d’emplois mais, au contraire, facilite les départs, notamment de seniors. En outre, elle rend plus difficiles les négociations des syndicats avec l’entreprise car les travailleurs seniors peuvent être plus enclins à partir avec une indemnité plutôt que de négocier une formation ou un reclassement.
Cette hypothèse est également soutenue par la CGT : “C’est un boulevard pour certaines entreprises qui pourront se débarrasser de salariés ayant de l’ancienneté”.
Les craintes syndicales ont été renforcées par la suppression du contrat de génération à compter du 24 décembre 2017. Ce dispositif ouvrait droit à une aide pour les entreprises de moins de 300 salariés qui embauchaient un jeune et maintenaient en emploi un salarié de 57 ans au moins.
L’avenir du CDI
La création d’un mode de rupture du contrat à durée indéterminée (CDI) sans motif pourrait ouvrir une brèche dans la sécurité que procure ce contrat de travail.
La rupture conventionnelle ne pose aucune condition temporelle à l’embauche de nouveaux salariés. L’entreprise peut embaucher immédiatement après le départ de salariés en rupture conventionnelle. Pour la CGT, “l’entreprise peut se séparer à l’amiable de ses employés les plus coûteux pour en embaucher des plus jeunes à moindre coût, en contrat précaire, pratique qui accélère la perte des compétences, qualifications et savoir-faire”.
Rupture conventionnelle individuelle et collective : histoire d’une codification
La rupture conventionnelle collective est la version négociée à l’échelle d’une entreprise de la rupture conventionnelle individuelle négociée directement entre l’employeur et le salarié.
La rupture conventionnelle a été introduite dans le code du travail en 2008. Elle rend possible la rupture d’un CDI sans passer par un licenciement ou une démission.
Entre août 2008 et fin 2010, le dispositif de rupture conventionnelle individuelle a attiré 480 000 personnes qualifiées de volontaires au départ, selon une étude du ministère du travail. Le nombre de ruptures conventionnelles progresse tous les ans. En 2018, 437 700 ruptures conventionnelles individuelles ont été homologuées par les Direccte, contre 192 000 en 2009.
En 2015, le Centre d’études de l’emploi (CEE) a publié une étude dans laquelle il évaluait les usages de la rupture conventionnelle de CDI. Il apparaissait que les garanties proposées aux salariés étaient peu utilisées et le montant des indemnités de rupture conventionnelle ne s’éloignait guère du minimum légal pour la moitié des salariés. Pour les employeurs, la rupture conventionnelle était perçue comme un mode de rupture sécurisé juridiquement (contentieux quasi inexistant).
Pour le CEE, l’objectif de fluidification du marché du travail n’était que partiellement rempli, le dispositif permettant des ruptures de contrat de travail qui n’auraient pas eu lieu alors que l’effet sur les embauches restait difficile à évaluer.
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